Thursday, August 16, 2012

Les éleveurs recherchent l’eau et la paix au Tchad : compte-rendu d’un exercice participatif de cartographie au Sahel

BAÏBOKOUM, TCHAD : Du 31 juillet au 11 août 2012, l’Association des Femmes Peules Autochtones du Tchad (AFPAT), en collaboration avec le Secrétariat du Comité de Coordination des Peuples Autochtones d'Afrique (IPACC, Indigenous Peoples of Africa Coordinating Committee), a dirigé une formation sur la modélisation tridimensionnelle participative dans la région de Baïbokoum, dans le Logone oriental, dans le sud du Tchad.


Dialogue à trois sur le changement climatique from CTA on Vimeo.

Le projet de cartographie tchadien mettait l’accent sur la formation d’éleveurs activistes de différentes parties du Tchad, ainsi que de pays voisins et d’Afrique de l’Est, pour les initier aux bases de la cartographie et leur apprendre comment mener un exercice de cartographie participative en 3D (CP3D) avec des peuples autochtones M’bororo nomades et semi-nomades dans la région de Baïbokoum.

La population rurale de Baïbokoum est confrontée à des défis liés à la concurrence pour les ressources similaires à ceux d’autres parties d’Afrique. Ils comprennent les changements dans l’utilisation de la terre, notamment l’empiètement par des exploitants sédentaires, la perte de la biodiversité résultant de la modification de l’utilisation de la terre, l’impact des industries extractives et les impacts du changement climatique. Tous ces facteurs contribuent à l’accroissement de la vulnérabilité des populations, à la dégradation des sols et de la biodiversité, à l’insécurité alimentaire et à des risques de conflit.

Le projet Baïbokoum s’inscrit dans le prolongement de l’atelier qui s’est déroulé en novembre 2011 à N’Djamena, au Tchad, où des éleveurs de l’AFPAT et du réseau IPACC ont rencontré l’Organisation météorologique mondiale, l’UNESCO, le CTA et les services météorologiques du Tchad, pour débattre de l’adaptation au climat et des risques encourus aujourd’hui par les communautés nomades en Afrique. L’atelier de N’Djamena a mené à la Déclaration de N’Djamena sur le savoir traditionnel et l’adaptation au climat présentée à la 17e Conférence des Parties à la Convention-Cadre des Nations Unies sur les Changements Climatiques.

Les membres de la communauté nomade et semi-nomade des villages du district ont ensuite passé trois jours à coder la carte avec le savoir traditionnel autochtone, montrant l’utilisation des terres, l’itinéraire traditionnel de la migration du bétail, les caractéristiques de l’écosystème et les informations relatives à la biodiversité. Les stagiaires sont venus à Baïbokoum en provenance de cinq régions différentes du Tchad, ainsi que du Niger, du Cameroun, du Kenya, de la Tanzanie et de l’Ouganda. Le soutien technique et la formation ont été fournis par M. Barthelemy Boika du Réseau des Ressources Naturelles de la République Démocratique du Congo. Le Secrétariat de l’IPACC (Afrique du Sud) a également contribué à la formation et donné des conseils.


Les stagiaires ont réalisé des travaux pratiques avec des cartes provisoires, une formation aux compétences GPS, le choix d’une légende dans une langue locale (dans ce cas, le fufulde), et se sont initiés aux bases de la cartographie, de la mise à l’échelle et du géoréférencement. Ils ont passé quatre jours à élaborer une maquette 3D géoréférencée à échelle de Baïbokoum et de ses environs (24km x 20 km ; échelle 1:10 000).

La maquette en 3D qui en a résulté possédait quelques caractéristiques notables, dont l’accent mis par les éleveurs sur les différents types d’eau de surface – saisonnière, permanente, marécageuse et vive. Les éleveurs ont également pu identifier six espèces d’arbre protégées par la loi coutumière M’bororo. Ces six espèces d’arbre ont toutes des propriétés médicinales et une utilité dans l’écosystème et ne peuvent donc être ni coupées, ni endommagées. Elles servent également de repères lors des déplacements depuis des générations.

Les éleveurs se souciaient principalement de l’expansion des exploitants sédentaires qui ont bloqué les routes traditionnelles de transhumance le long desquelles le bétail pouvait accéder à l’eau potable. Les éleveurs accusaient les exploitants de brûler leurs champs, nuisant ainsi à la biodiversité, y compris des espèces d’arbres protégées depuis des temps immémoriaux. Les éleveurs ont remarqué que l’on creusait maintenant des puits de pétrole dans le territoire voisin, ainsi qu’un pipeline, mettant la pression sur eux des deux côtés. De brusque changements de temps et de climat, avec à la fois des sécheresses et des inondations, les ont rendus plus vulnérables et a renforcé le risque de conflit armé dans la région.

Plus de soixante membres de la communauté M’bororo ont participé à la cartographie, ainsi que les stagiaires, des villageois et des enfants scolarisés. Les dirigeants de la communauté se sentaient confiants et pensaient que la carte pouvait contribuer à résoudre les conflits naissants dans la communauté. L’événement a été clôturé officiellement le 10 août par Son Excellence le Gouverneur du Logone oriental, le Président de 5% Revenue from Oil Exploration, le Préfet et le Sous-préfet de Baïbokoum et des représentants de la Gendarmerie nationale et des Ministères de l’Élevage et de l’Agriculture et du Département en charge du changement climatique.

Le Gouverneur a immédiatement proposé de jouer le rôle de médiateur dans un processus de négociation entre les communautés sédentaires et nomades pour rouvrir les couloirs de transhumance afin que les éleveurs puissent de nouveau accéder à l’eau. Les participants ont indiqué que ces communautés pouvaient entretenir des relations de symbiose et de soutien. La résolution des conflits et l’adoption d’une approche préventive pour éliminer la concurrence vis-à-vis des ressources constituent un aspect fondamental de l’adaptation au climat et du développement des zones rurales.

La Coordinatrice de l’AFPAT, Hindou Oumarou Ibrahim, a salué le gouvernement et la communauté pour leur volonté d’explorer de nouvelles voies de coopération. Elle a souligné l’importance que les hommes et les femmes M’bororo accorde depuis des siècles à la conservation de la nature et a entamé des discussions avec le Président de 5% oil revenues pour examiner comment les éleveurs M’bororo pourraient être davantage impliqués dans la protection des espaces forestiers menacés dans les montagnes environnant Baïbokoum.

Le processus de cartographie, l’étude des questions conflictuelles et l’établissement de la paix ont été documentés par Jade Productions qui a réalisé un film qui sera diffusé pour la première fois à la 18e Conférence des Parties à la Convention-Cadre des Nations Unies sur les Changements Climatiques prévue à Doha, au Qatar. Les médias nationaux ont réalisé des reportages radiodiffusés tout au long de l'atelier puis une émission de télévision, à l'issue de l'événement protocolaire de clôture.

L’atelier a été organisé pendant le mois saint du Ramadan, ce qui a conféré une dimension supplémentaire car les enseignements et les valeurs religieuses peuvent également encourager les personnes à coopérer, même dans des circonstances où elles ne partagent pas la même langue. Pendant les deux semaines qu’a duré l’atelier, les éleveurs autochtones du Kenya, du Cameroun et du Niger se sont joints à leurs homologues tchadiens pour les prières et le jeûne.

L’événement a bénéficié de la générosité du Centre technique de coopération agricole et rurale ACP-UE (CTA), avec un appui financier supplémentaire de Bread for the World, Norwegian Church Aid et Misereor. Des documents, photographies et vidéos peuvent être consultés sur www.ipacc.org.za/fr


Crédits pour le texte et les photos : Nigel Crawhall, IPACC

Pastoralists seek water and peace in Chad: Account of a participatory mapping exercise in the Sahel


BAÏBOKOUM, CHAD: 31 July to 11 August 2012, the Association des Femmes Peules Autochtones du Tchad (AFPAT), in cooperation with the Secretariat of the Indigenous Peoples of Africa Coordinating Committee (IPACC), conducted a training course on Participatory 3 Dimensional Modelling in the area of Baïbokoum, Logone Oriental, in southern Chad.

The Chadian mapping project focused on training pastoralist activists from different parts of Chad, as well as from neighbouring countries and East Africa in the basics of cartography and how to conduct a Participatory 3D Modeling (P3DM) exercise with nomads and semi-nomadic M’bororo indigenous people in the Baïbokoum area.


Three-way dialogue on climate change from CTA on Vimeo.

Baïbokoum’s rural population is faced with competing resource challenges similar to other parts of Africa. These include changes in land use, notably encroachment by sedentary farmers, loss of biodiversity as a result of land use change, the impact of extractive industries and climate change impacts. All of these factors contribute to increasing human vulnerability, soil and biodiversity degradation, food insecurity and risks of conflict.

The Baïbokoum project followed on the November 2011 workshop in N’Djamena, Chad where pastoralists from AFPAT and the IPACC network met with the World Meteorological Organisation, UNESCO, CTA and the meteorological services of Chad to discuss climate adaptation and the risks experienced by nomadic communities in Africa today. The N’Djamena workshop led to the N’Djamena Declaration on traditional knowledge and climate adaptation which was presented at the 17th Conference of Parties to the UN Framework Convention on Climate Change.

Nomadic, semi-nomadic community members from the villages in the district then spent 3 days coding the map with the indigenous traditional knowledge; showing land use, traditional routes of cattle migration, ecosystem features, and biodiversity information. 

Trainees came to Baïbokoum from five different regions of Chad, as well as from Niger, Cameroon, Kenya, Tanzania and Uganda. Technical support and training was provided by Mr Barthelemy Boika from the Réseau des Ressources Naturelles in the Democratic Republic of Congo. Additional training and guidance was provided by the Secretariat of IPACC, from South Africa.

Trainees did practical work with ephemeral mapping, GPS skills training, elicitation of a vernacular language legend (in this case in Fufulde), and orientation on the basics of cartography, scaling and georeferencing.

They spent four days constructing a scaled, geo-referenced 3D model of Baïbokoum and environs (24km x 20 km; 1:10 000 scale).

The resulting Participatory 3D Model (P3DM) had some notably features, including the emphasis placed by pastoralists on different types of surface water – seasonal, permanent, swampy and flowing.

Herders also were able to identify six tree species which are protected under M’bororo customary law. The six species of trees, all of them with medicinal and ecosystems functions, may not be cut or damaged, and serve as navigation reference points over generations.

Herders’ main concerns revolved around the expansion of sedentary farmers who have blocked traditional transhumance routes that allow cattle access to potable water. Herders accuse the farmers of burning their fields, thus killing off biodiversity and including long protected tree species. Herders noted that there were now oil wells being dug in the adjacent territory and a pipeline that are creating pressure on them from both sides. Sudden shifts of weather and climate, including both droughts and floods have made them more vulnerable and increased the risk of armed conflict in the region.

Over sixty M’bororo community members participated in the mapping, as well as the trainees, villagers and school goers. Leaders in the community felt confident that the map could help alleviate simmering conflicts in the community.

His Excellency, the Governor of Logone Orientale
The event was formally closed on 10 August by His Excellency, the Governor of Logone Orientale, the President of the 5% Revenue from Oil Exploration, the Prefect and Deputy-Prefect of Baïbokoum, and representatives of the national Gendarmerie and Ministries of Livestock, Agriculture and the Department responsible for climate change.

The Governor immediately offered to mediate a process between sedentary and nomadic communities to restore transhumance corridors for herders to be able to access water again. Participants noted that sedentary and nomadic communities could have symbiotic and supportive relationships. Resolving conflicts and having a preventative approach to resolving resource competition is a fundamental aspect of climate adaptation and development of rural areas.

AFPAT Coordinator, Hindou Oumarou Ibrahim praised the government and community for their willingness to explore new avenues of cooperation. She noted the traditional importance placed by M’bororo men and women on nature conservation and has opened discussions with the President of the 5% oil revenues to look at how M’bororo herders can be more involved in protecting the threatened forest spaces in the mountains outside Baïbokoum.

The mapping process and examination of issues of conflict and peace building was documented by Jade Productions as a film to be released for the 18th Conference of Parties to the UN Framework Convention on Climate Change in Doha, Qatar. National media reported throughout the workshop on radio and then broadcast a television report after the closing protocol event.

The workshop took place during the holy month of Ramadan, which added an extra dimension of how religious teachings and values can also encourage people to work cooperatively, even in circumstances where they do not share a language between them. Indigenous herders from Kenya, Cameroon and Niger all joined their Chadian partners during the prayers and fasting during the two week workshop.

The event was generously supported by the Technical Centre for Agricultural and Rural Cooperation ACP-EU (CTA), with additional financial support from Bread for the World, Norwegian Church Aid and Misereor. Documents, photographs and videos can be seen on www.ipacc.org.za

Credits for text and images: Nigel Crawhall, IPACC

Tuesday, August 14, 2012

Making Rangelands Secure - First issue of the Bulletin published

In 2010 the International Land Coalition (ILC) with partners IFAD, IUCN-WISP, Procasur and RECONCILE established a learning initiative for sharing experience and practice in making rangelands secure for local rangeland users. A number of activities have been developed to enable this process. In February 2012 a learning route took place between Nairobi and Arusha, visiting four host communities and/or organisations who shared their own experience of securing rights to their land and resources, in different land tenure and politicial and/or social contexts. Twenty-four participants joined the learning route from around the world, and in particular from East and Horn of Africa. The learning route is being repeated in September 2012, with a large participation from government representatives from Sudan, and in particular Darfur state.

The learning initiative is also working with a number of other partners including Oxfam GB, ILRI, USAID-funded programmes and national governments in the region to further develop and document lessons learnt and influence developing land tenure policies and their implementation. The experiences are being discussed and documented in different forums and through a range of publications. The Making Rangelands Secure Bulletin is one such publication, that provides up-to-date information and news on important and relevant issues, processes and activities taking place in order to better secure rights to rangelands.

Articles provide discussion and information on village land use planning in Tanzania; shared experiences on securing of livestock corridors in West Africa and Sudan; implications of Kenya's Constitution on rangelands; the securing of rights for hunter-gatherers in Tanzania; the development of policy and legislation related to rangelands in Uganda; as well as news from members and partners of the learning initiative.

Wednesday, August 01, 2012

Palawan - our struggle for nature and culture



The struggle to save Palawan (known as the Philippines’ Last Frontier) is not only about saving trees and rare species. It is also about nourishing the Filipino cultural heritage, so powerfully represented by those indigenous communities that - after escaping Spanish and American colonization (while resisting the new ‘mining imperialism’ now) - continue to represent the 'living roots' from which all Filipinos originate. Therefore, environmental plundering by mining companies is not only a crime against nature but it is also a crime against culture, a sort of genocide that annihilates the most profound roots of the Filipino's history and ultimately plunders the cultural heritage of the whole nation! In this movie, Kawali, the mythical ancestor depicted by Batak narrators emphasises humility and trust towards the supernal beings in charge of animals and plants. On the contrary, the attitude of Kawali’s brother-in-law comes to represent the epitome of inappropriate behaviour, such as the lack of respect towards the mystical keepers of animals and - here specifically - towards the “father of bees”: a relationship that contemporary Batak continues to restore though the lambay ceremony. The sudden switch between the narration of the Batak myth and the threats posed by mining companies serves to introduce the work of ALDAW, a local network of indigenous peoples struggling for the protection of their ancestral land against large-scale corporations.