La narration des co-facilitateurs locaux publiée le 25 mars 2015 a été enrichie, le 19 mai 2015, avec la publication d'un article d'opinion écrit par un observateur venu de la République démocratique du Congo sous l'invitation du Centre technique de coopération agricole et rurale (CTA).
Ecrit par Dominique Bikaba, Strong Roots Congo
La Modélisation participative en trois dimensions (MP3D) a déjà démontré, à travers plusieurs pays, un potentiel non négligeable quand il s’agit de mobiliser des communautés pour qu’elles planifient et gèrent de façon participative le territoire où elles habitent et les ressources naturelles qui les entourent. A Madagascar, le tout premier exercice de MP3D a eu lieu en février 2015, notamment dans le bassin versant d’Avaratrambolo.
L’exercice était conduit dans une zone rurale et agricole à plus ou moins 35 km de la capitale malgache, Antananarivo. La population de cette zone située dans la partie septentrionale de l’ile ne vit que de l’agriculture rizicole, avec un faible pouvoir d’achat et d’accès aux marchés. Le paysage rural est dominé par des terrasses de cultures rizicoles, certaines portions de plantations sylvicoles et un petit reliquat de forêt naturelle. La zone est aussi importante car elle constitue un bastion de sources des principales rivières de la région.
L’exercice de modélisation participative a eu lieu dans le cadre d’un projet de promotion agricole et de captage de l’eau potable intitulé « Allons vers une évolution », soit Ndao Hivoatra en langue malgache. Ce projet, qui a mobilisé plusieurs partenaires locaux, nationaux et internationaux dans cette partie de Madagascar, revêt une connotation particulière pour les communautés locales.
L’implémentation du projet de développement rural se déroule dans trois villages, avec le financement de la Banque Mondiale via l'Association pour le Renforcement de la Recherche Agricole en Afrique Orientale et Centrale (ASARECA) est sous la responsabilité d’Artelia Madagascar avec l’appui technique de Farming and Technology for Africa (FTA) et le Centre national de la recherche appliquée au développement rural (FOFIFA) comme partenaire scientifique. L'exercice de MP3D représente une composante ponctuelle du projet, qui compte avec le soutien technique et financier du Centre technique de coopération agricole et rurale (CTA).
Comme dans plusieurs zones en Afrique, les questions foncières sont très sensibles dans cette région. C’est ainsi qu’on explique que, en général, des communautés locales puissent être moins participatives aux multiples projets de développement rural dans le milieu. L’exercice MP3D au Madagascar a contribué sensiblement à briser les barrières liées aux sensibilités foncières de ce projet. Comme pour les projets précédents dans la zone, le projet Ndao hivoatra était sous-entendu par les communautés rurales comme une astuce de l’accaparement des terres ancestrales au profit de certaines multinationales qui se font passer pour promoteurs du développement rural dans des zones reculées en Afrique. Quand bien même, la question de la cartographie était comprise par les communautés bénéficiaires comme un moyen d’identifier les terres propices pour cette allégation d’accaparement, malgré les multiples séances de sensibilisations des facilitateurs locaux qui ont précédé l’exercice de MP3D dans le village d’Ambohitrakely.
La première phase de l’exercice prévoyait la construction de la maquette de MP3D. Cette étape était précédée par un atelier regroupant les facilitateurs locaux et internationaux venus de la République Démocratique du Congo (RDC), ainsi que les représentants des institutions impliquées dans le projet Ndao hivoatra pour donner l’ossature de l’exercice et pour identifier les préalables matériels, logistiques et de participation communautaire dans la zone du projet. C’est lors de cet atelier qu’une compréhension commune sur l’ampleur du projet de la maquette s’est dessinée.
La première visite des facilitateurs au village d’Ambohitrakely s’est déroulée sous une pluie torrentielle dans une zone érodée et moins praticable. Cette visite visait à mobiliser particulièrement les enfants écoliers pour contribuer aux travaux de traçage et de découpage des couches de la maquette, après avoir réuni au site tous les matériels requis. Le travail des enfants sur la maquette a suscité la bonne curiosité de leurs parents. Progressivement, les parents des enfants et beaucoup d’autres habitants des villages du bassin versant d’Avaratrambolo se sont mobilisés pour contribuer à la construction de la maquette. Madagascar MP3D
Le 13 février 2015, lors de son exposition officielle, la maquette a réuni dans le village d’Ambohitrakely des représentants de différents ministères en charge des affaires foncières et du développement rural, des chercheurs et des représentants des acteurs de développement intervenant dans la zone, les autorités locales, religieuses et coutumières, ainsi que toutes les couches sociales de la population qui initialement semblaient participer timidement au projet Ndao Hivoatra suite à sa sensibilité liée aux questions foncières. La maquette s’est avérée donc un élément réconciliateur avec le projet. La participation active des communautés locales du bassin versant dans la construction de la maquette et, particulièrement, dans la capture des données géo-spatiales de la zone, a notablement accru la confiance du chef des bénéficiaires. Il faut savoir que la maquette appartient aux communautés locales en tant qu’outil pour orienter les travaux du projet Ndao Hivoatra.
La maquette de MP3D se veut donc un outil puissant de planification, de gestion et d’aménagement foncier et forestier. Le succès de cet exercice à Madagascar a suscité l’utilité de l’étendre dans d’autres régions en Afrique. Par exemple, l’exercice pourrait être répliqué dans l’est de la RDC, où le processus de gouvernance et de gestion des forêts communautaires poursuit son parcours. Après la publication du Décret No 14/018 du 02 août 2014 fixant les modalités d’attribution des concessions forestières aux communautés locales en RDC, celles-ci et les peuples autochtones qu’elles regroupent, nécessitent cet outil pour les zonages de leurs territoires ancestraux au profit des projets de conservation et de développement durable dans la région. La création et le fonctionnement des forêts communautaires, ainsi que la reconnaissance des Aires et territoires du patrimoine autochtone et communautaire (APACs) en RDC est un processus qui requiert non seulement la passation d’une législation y afférente, mais aussi et surtout, d’un engagement déterminant des autres parties prenantes. Sans l’accompagnement de cette initiative par les autres acteurs techniques, scientifiques et financiers, la bonne volonté du gouvernement de la RDC pourra difficilement se réaliser.
Note de l'auteur : Le succès de cette modélisation participative en 3 dimensions revêt aussi les qualités et les compétences de l’expert en MP3D et facilitateur de cet exercice cartographie participative à Madagascar, Barthelemy Boika, qui a démontré ses talents d’éducateur et de mobilisateur communautaire tout au long de l’exercice dans le bassin versant d’Avaratrambolo. Nos remerciements s’adressent également au Centre technique de coopération agricole et rurale (CTA) pour l’appui technique et financier à ce projet de MP3D à Madagascar.
Regardez l'entretien vidéo avec M. Dominique Bikaba, directeur de Strong Roots Congo. Le CTA invita Dominique à participer à l'exercice de façon à l'exposer à la pratique de MP3D et ainsi faciliter la reproduction de l'exercice dans le bassin du Congo.
Commentaires de Dominique Bikaba sur sa participation à un exercice de MP3D à Madagascar from CTA on Vimeo.Ecrit par Dominique Bikaba, Strong Roots Congo
La Modélisation participative en trois dimensions (MP3D) a déjà démontré, à travers plusieurs pays, un potentiel non négligeable quand il s’agit de mobiliser des communautés pour qu’elles planifient et gèrent de façon participative le territoire où elles habitent et les ressources naturelles qui les entourent. A Madagascar, le tout premier exercice de MP3D a eu lieu en février 2015, notamment dans le bassin versant d’Avaratrambolo.
L’exercice était conduit dans une zone rurale et agricole à plus ou moins 35 km de la capitale malgache, Antananarivo. La population de cette zone située dans la partie septentrionale de l’ile ne vit que de l’agriculture rizicole, avec un faible pouvoir d’achat et d’accès aux marchés. Le paysage rural est dominé par des terrasses de cultures rizicoles, certaines portions de plantations sylvicoles et un petit reliquat de forêt naturelle. La zone est aussi importante car elle constitue un bastion de sources des principales rivières de la région.
L’exercice de modélisation participative a eu lieu dans le cadre d’un projet de promotion agricole et de captage de l’eau potable intitulé « Allons vers une évolution », soit Ndao Hivoatra en langue malgache. Ce projet, qui a mobilisé plusieurs partenaires locaux, nationaux et internationaux dans cette partie de Madagascar, revêt une connotation particulière pour les communautés locales.
L’implémentation du projet de développement rural se déroule dans trois villages, avec le financement de la Banque Mondiale via l'Association pour le Renforcement de la Recherche Agricole en Afrique Orientale et Centrale (ASARECA) est sous la responsabilité d’Artelia Madagascar avec l’appui technique de Farming and Technology for Africa (FTA) et le Centre national de la recherche appliquée au développement rural (FOFIFA) comme partenaire scientifique. L'exercice de MP3D représente une composante ponctuelle du projet, qui compte avec le soutien technique et financier du Centre technique de coopération agricole et rurale (CTA).
Comme dans plusieurs zones en Afrique, les questions foncières sont très sensibles dans cette région. C’est ainsi qu’on explique que, en général, des communautés locales puissent être moins participatives aux multiples projets de développement rural dans le milieu. L’exercice MP3D au Madagascar a contribué sensiblement à briser les barrières liées aux sensibilités foncières de ce projet. Comme pour les projets précédents dans la zone, le projet Ndao hivoatra était sous-entendu par les communautés rurales comme une astuce de l’accaparement des terres ancestrales au profit de certaines multinationales qui se font passer pour promoteurs du développement rural dans des zones reculées en Afrique. Quand bien même, la question de la cartographie était comprise par les communautés bénéficiaires comme un moyen d’identifier les terres propices pour cette allégation d’accaparement, malgré les multiples séances de sensibilisations des facilitateurs locaux qui ont précédé l’exercice de MP3D dans le village d’Ambohitrakely.
La première phase de l’exercice prévoyait la construction de la maquette de MP3D. Cette étape était précédée par un atelier regroupant les facilitateurs locaux et internationaux venus de la République Démocratique du Congo (RDC), ainsi que les représentants des institutions impliquées dans le projet Ndao hivoatra pour donner l’ossature de l’exercice et pour identifier les préalables matériels, logistiques et de participation communautaire dans la zone du projet. C’est lors de cet atelier qu’une compréhension commune sur l’ampleur du projet de la maquette s’est dessinée.
La première visite des facilitateurs au village d’Ambohitrakely s’est déroulée sous une pluie torrentielle dans une zone érodée et moins praticable. Cette visite visait à mobiliser particulièrement les enfants écoliers pour contribuer aux travaux de traçage et de découpage des couches de la maquette, après avoir réuni au site tous les matériels requis. Le travail des enfants sur la maquette a suscité la bonne curiosité de leurs parents. Progressivement, les parents des enfants et beaucoup d’autres habitants des villages du bassin versant d’Avaratrambolo se sont mobilisés pour contribuer à la construction de la maquette. Madagascar MP3D
Le 13 février 2015, lors de son exposition officielle, la maquette a réuni dans le village d’Ambohitrakely des représentants de différents ministères en charge des affaires foncières et du développement rural, des chercheurs et des représentants des acteurs de développement intervenant dans la zone, les autorités locales, religieuses et coutumières, ainsi que toutes les couches sociales de la population qui initialement semblaient participer timidement au projet Ndao Hivoatra suite à sa sensibilité liée aux questions foncières. La maquette s’est avérée donc un élément réconciliateur avec le projet. La participation active des communautés locales du bassin versant dans la construction de la maquette et, particulièrement, dans la capture des données géo-spatiales de la zone, a notablement accru la confiance du chef des bénéficiaires. Il faut savoir que la maquette appartient aux communautés locales en tant qu’outil pour orienter les travaux du projet Ndao Hivoatra.
La maquette de MP3D se veut donc un outil puissant de planification, de gestion et d’aménagement foncier et forestier. Le succès de cet exercice à Madagascar a suscité l’utilité de l’étendre dans d’autres régions en Afrique. Par exemple, l’exercice pourrait être répliqué dans l’est de la RDC, où le processus de gouvernance et de gestion des forêts communautaires poursuit son parcours. Après la publication du Décret No 14/018 du 02 août 2014 fixant les modalités d’attribution des concessions forestières aux communautés locales en RDC, celles-ci et les peuples autochtones qu’elles regroupent, nécessitent cet outil pour les zonages de leurs territoires ancestraux au profit des projets de conservation et de développement durable dans la région. La création et le fonctionnement des forêts communautaires, ainsi que la reconnaissance des Aires et territoires du patrimoine autochtone et communautaire (APACs) en RDC est un processus qui requiert non seulement la passation d’une législation y afférente, mais aussi et surtout, d’un engagement déterminant des autres parties prenantes. Sans l’accompagnement de cette initiative par les autres acteurs techniques, scientifiques et financiers, la bonne volonté du gouvernement de la RDC pourra difficilement se réaliser.
Note de l'auteur : Le succès de cette modélisation participative en 3 dimensions revêt aussi les qualités et les compétences de l’expert en MP3D et facilitateur de cet exercice cartographie participative à Madagascar, Barthelemy Boika, qui a démontré ses talents d’éducateur et de mobilisateur communautaire tout au long de l’exercice dans le bassin versant d’Avaratrambolo. Nos remerciements s’adressent également au Centre technique de coopération agricole et rurale (CTA) pour l’appui technique et financier à ce projet de MP3D à Madagascar.
Regardez l'entretien vidéo avec M. Dominique Bikaba, directeur de Strong Roots Congo. Le CTA invita Dominique à participer à l'exercice de façon à l'exposer à la pratique de MP3D et ainsi faciliter la reproduction de l'exercice dans le bassin du Congo.