Le manque de synergie de certains projets entrave le développement des communautés dans beaucoup de régions de Madagascar. Au niveau des localités où le processus de la modélisation participative en trois dimensions (MP3D) a été développé, les responsables voient en cette nouvelle technique un atout fédérateur susceptible de favoriser la coordination des actions de développement.
« Trop d'aide ! A l'aide !!», ces trois mots ont fait la Une des grands titres de magazine rural de la Capitale malgache, attirant l'attention des lecteurs mais plus particulièrement des initiateurs de projets de développement. Faute de coordination des interventions, les bénéficiaires appellent à l'aide. Ils ne savent plus à quel saint se vouer, qu'au lieu de s'attendre à un développement harmonieux, ils se voient confronter à de l'anarchisme, de l'empiétement de projets. « S'il y avait eu une moindre réflexion commune entre les partenaires, cela aurait passé beaucoup mieux », soupire un leader paysan d'Anjazafotsy, Commune rurale d'Andranomafana, District de Betafo. En effet, cette carence se présente sous multiples facettes générant des impacts négatifs sur le développement local : chamboulement et désorganisation, réticence au changement, impossibilité de s'investir, difficulté à élaborer un plan d'aménagement...
Bref, ce contexte hostile ne permet pas au responsable d'avoir une vision holistique de la situation et d'élaborer à termes un schéma d'aménagement global de la Région. La situation demeure embarrassante. Les promoteurs se posent la question de savoir « Comment faire en sorte que les projets à mettre en œuvre à Madagascar s'articulent entre eux, se complètent, s'acheminent vers une vision commune, répondant aux attentes des bénéficiaires ?»
La maquette encourage le dialogue. A Anjazafotsy, le processus de la MP3D a réuni autour de la carte le Nord et le Sud, deux communautés en conflit où le développement n'est pas harmonieux. Malgré leur mésentente, le dialogue a été établi le long du processus. Le problème sur la répartition de la source en eau potable et le reboisement a été abordé sans difficulté. Les deux voisins commencent à discuter du développement local, quelques projets commencent à s'implanter au Sud. « Le fait que tout le monde soit réuni autour de la maquette suffise pour qu'un participant soulève le problème et le dialogue s'établit, alors qu'auparavant on esquive le point de discorde », raconte l'adjoint au Maire.
La maquette fournit les informations. Le manque d'information compromet les initiatives et rend les acteurs amorphes. Cette situation renvoie les intervenants dos à dos, ce qui limite leur rapprochement au détriment de la coordination des activités. A Mahiatrondro, Commune Rurale d'Ampefy, au Moyen Ouest, les informations affichées sur la carte, concernant l'avancée de l'ensablement, le manque de terrains cultivables et la disponibilité des pépinières ont éveillé les participants du danger imminent qui court sur eux. Du coup, chaque entité a été fixée sur leur tâche respective et la lutte contre la dégradation de l'environnement a été vite déclenchée. La synergie des activités va de soi : la communauté était en charge du reboisement, la Commune s'occupait des espaces à reboiser tandis que l'organisme AGRISUD mettait gratuitement à leur disposition des jeunes plants ! Une coordination presque parfaite.
La maquette entretient la solidarité. Pour s'attendre à un développement harmonieux, les acteurs devraient être solidaires et unis. Dans le même village de Mahiatrondro, la maquette a cultivé l'esprit de solidarité chez la communauté. « Comme si tout le monde est animé d'un seul esprit, celui de se donner la main, d'aller de l'avant ensemble », renchérit le chef du village. Dans cette localité de 3000 âmes, à l'issue de la confection de la maquette 3D du village, les habitants ont tenu différentes réunions en vue de mettre à l'épreuve tout ce que la maquette les a révélés : couloir des voleurs, source d'eau, terres disponibles...L'entraide de la population a fait reculer la recrudescence des Dahalo (bandits de chemin) et le ravage du feu de brousse. Cela a été le fruit du Dina, une charte interne du village élaboré par la communauté, elle-même. Grâce à leur courage et leur acharnement, le Dina a été depuis peu reconnu effectif par le tribunal local.
Certes, le processus de la cartographie participative en trois dimensions promeut la synergie des actions de développement villageois, toutefois les acteurs préconisent la modélisation d'une zone plus vaste, à l'échelle d'une ou plusieurs Communes afin de s'assurer d'une synergie plus élargie.
Article par Andriatiana Mamy
« Trop d'aide ! A l'aide !!», ces trois mots ont fait la Une des grands titres de magazine rural de la Capitale malgache, attirant l'attention des lecteurs mais plus particulièrement des initiateurs de projets de développement. Faute de coordination des interventions, les bénéficiaires appellent à l'aide. Ils ne savent plus à quel saint se vouer, qu'au lieu de s'attendre à un développement harmonieux, ils se voient confronter à de l'anarchisme, de l'empiétement de projets. « S'il y avait eu une moindre réflexion commune entre les partenaires, cela aurait passé beaucoup mieux », soupire un leader paysan d'Anjazafotsy, Commune rurale d'Andranomafana, District de Betafo. En effet, cette carence se présente sous multiples facettes générant des impacts négatifs sur le développement local : chamboulement et désorganisation, réticence au changement, impossibilité de s'investir, difficulté à élaborer un plan d'aménagement...
Le coloriage de la carte 3D dans la commune d'Andranomafana, commune de Betafo Antsirabe |
Quand la coordination fait défaut
Au premier abord, le manque de coordination se manifeste par un développement non équilibré. Dans une même localité, certaines communautés manquent de projets, alors que d'autres en sont inondés. La Commune d'Andranomafana en est victime. Ce petit village de 48 km2 se voit disloqué en deux : le Nord et le Sud. Cinq projets ont élu domicile au Nord tandis que le Sud est complètement déserté. « C'est parce que le Sud est loin de la route nationale, les habitants y sont moins instruits », tente d'expliquer une paysanne. « Il n'en est rien !» réplique l'Adjoint au Maire, Solofo Marc Rakotondrafara. « Cela résulte d'un manque de coordination » martèle-t-il. Les intervenants ne se sont pas suffisamment organisés, choisissant à leur guise leurs zones d'intervention et leurs thématiques préférées sans pour autant en discuter avec les autres. « C'est le règne de chacun pour soi, tout pour moi. L'entente entre les intervenants fait défaut » affirme Rajorosoana Razafimahatratra, technicien du BIMTT (Bureau de Liaison des Institutions de Formation en milieu Rural à Madagascar). La situation laisse les paysans perplexes. Dans ce même village, deux projets se profilent pour mettre en œuvre deux activités presque similaires. L'un, un projet d'alimentation en eau potable et l'autre la lutte contre la défécation à l'air libre. De l'avis du chef de village, « ça aurait été mieux, s'ils ont combiné ces deux activités en une seule (eau et assainissement). Comme ça, les bénéficiaires ne seront pas divisés et la mobilisation beaucoup plus facile », suggère-t-il. Le malheur ne vient jamais seul, plus grave lorsque l'organisation est défaillante, la qualité du service en pâtit. Aussi arrive-t-il que les messages véhiculés par ces projets de développement se contredisent. C'est le cas de nombreux paysans qui ne peuvent même plus s'investir. En effet, l'administration les encourage à enregistrer leurs parcelles auprès du bureau foncier local afin d'obtenir un certificat foncier. Mais au grand dam des agriculteurs, l'institution financière ne reconnaît pas ce même certificat et refuse de leur octroyer un crédit. « J'aimerais qu'ils s'entendent entre eux » se plaint le leader paysan, en quête de fonds pour prévoir la récolte prochaine. Tout cela inquiète les techniciens craignant en effet la réticence des paysans aux innovations. Il n'y a pas que les paysans bénéficiaires qui sont affectés, les dirigeants n'en sont pas non plus épargnés. Ils découvrent également leur programme de développement entravé. Le Directeur régional du développement rural de Miarinarivo, Serge Andriamiarinera, éprouve de difficulté à dresser le plan d'aménagement de sa circonscription : « les initiateurs de projets en place ont des visions différentes, parfois même opposées. Il s'avère difficile de monter un projet d'aménagement dans une situation pareille » reconnaît-il.Bref, ce contexte hostile ne permet pas au responsable d'avoir une vision holistique de la situation et d'élaborer à termes un schéma d'aménagement global de la Région. La situation demeure embarrassante. Les promoteurs se posent la question de savoir « Comment faire en sorte que les projets à mettre en œuvre à Madagascar s'articulent entre eux, se complètent, s'acheminent vers une vision commune, répondant aux attentes des bénéficiaires ?»
Vivement, le processus de la MP3D !
Dans les trois régions de la Grande île où le processus de la MP3D a été développé, des éléments de réponses sont préconisés. Le Secrétaire Général du BIMTT, Rajoelisolo Kotondrajaona voit en la modélisation participative en trois dimensions (MP3D), un capital fédérateur, capable de promouvoir la synergie des actions de développement villageois : « le processus de la (MP3D) peut y jouer un rôle prépondérant, je dirai même sa raison d'être », affirme-t-il. Rajoelisolo reconnait la suprématie du processus en ajoutant : « la MP3D comprend tout ce qu'il faut pour une meilleure synergie des activités, en trois piliers : le dialogue, les informations, la solidarité. » La maquette participative dispose d'un pouvoir, gage de coordination. Celui de favoriser le dialogue entre les différents acteurs, de fournir des informations fiables, factuelles sur le lieu d'intervention et de cultiver l'esprit de solidarité dans la zone d'action.La maquette encourage le dialogue. A Anjazafotsy, le processus de la MP3D a réuni autour de la carte le Nord et le Sud, deux communautés en conflit où le développement n'est pas harmonieux. Malgré leur mésentente, le dialogue a été établi le long du processus. Le problème sur la répartition de la source en eau potable et le reboisement a été abordé sans difficulté. Les deux voisins commencent à discuter du développement local, quelques projets commencent à s'implanter au Sud. « Le fait que tout le monde soit réuni autour de la maquette suffise pour qu'un participant soulève le problème et le dialogue s'établit, alors qu'auparavant on esquive le point de discorde », raconte l'adjoint au Maire.
La maquette fournit les informations. Le manque d'information compromet les initiatives et rend les acteurs amorphes. Cette situation renvoie les intervenants dos à dos, ce qui limite leur rapprochement au détriment de la coordination des activités. A Mahiatrondro, Commune Rurale d'Ampefy, au Moyen Ouest, les informations affichées sur la carte, concernant l'avancée de l'ensablement, le manque de terrains cultivables et la disponibilité des pépinières ont éveillé les participants du danger imminent qui court sur eux. Du coup, chaque entité a été fixée sur leur tâche respective et la lutte contre la dégradation de l'environnement a été vite déclenchée. La synergie des activités va de soi : la communauté était en charge du reboisement, la Commune s'occupait des espaces à reboiser tandis que l'organisme AGRISUD mettait gratuitement à leur disposition des jeunes plants ! Une coordination presque parfaite.
La maquette entretient la solidarité. Pour s'attendre à un développement harmonieux, les acteurs devraient être solidaires et unis. Dans le même village de Mahiatrondro, la maquette a cultivé l'esprit de solidarité chez la communauté. « Comme si tout le monde est animé d'un seul esprit, celui de se donner la main, d'aller de l'avant ensemble », renchérit le chef du village. Dans cette localité de 3000 âmes, à l'issue de la confection de la maquette 3D du village, les habitants ont tenu différentes réunions en vue de mettre à l'épreuve tout ce que la maquette les a révélés : couloir des voleurs, source d'eau, terres disponibles...L'entraide de la population a fait reculer la recrudescence des Dahalo (bandits de chemin) et le ravage du feu de brousse. Cela a été le fruit du Dina, une charte interne du village élaboré par la communauté, elle-même. Grâce à leur courage et leur acharnement, le Dina a été depuis peu reconnu effectif par le tribunal local.
Une vision holistique du terroir
La MP3D dispose d'une qualité favorisant l'intégration des aspects socioculturels, économiques et environnementaux du milieu. La vue plongeante donnant une vision holistique du terroir crée une perspective commune à laquelle les participants fixent leur regard. Bref : « une synergie qui s'impose tout naturellement » conclut le technicien du BIMTT. A Miarinarivo, le Directeur régional du développement rural, après avoir observé l'intérêt de la maquette encourage sa mise à l'échelle dans toutes les zones de son intervention. « Je suis en train de monter le projet d'aménagement de la Région. Les informations fournies par la maquette, l'ambiance qu'elle entretient, le dialogue qui s'ouvre, feront avancer considérablement le projet » soutient-il. Pour le Directeur, il est important d'avoir une vision globale de la communauté, des terres et des ressources naturelles du milieu afin de développer un plan d'aménagement exhaustif et pertinent : « cela permet de prendre en compte tous les aspects existants. Des projets, où les uns ne marchent pas sur les pieds des autres, où les intervenants ne se tournent pas le dos », assure-t-il. Sur le littoral Est du pays, le Directeur Général de la Pêche, Jean Razafimandimby, encourage la multiplication des maquettes participatives dans d'autres zones car elles fournissent des données marines précieuses utiles pour prendre les décisions informées et coordonner les actions de préservation d'une pêche responsable dans cette zone marine sévèrement menacée. Les acteurs de la pêche marine, à savoir la Direction régionale de la Pêche, la Mairie de Fenerive-Est, les opérateurs, les pêcheurs prévoient un atelier en vue de discuter de la coordination des actions et des mesures à prendre contre la pêche illégale dans la Commune.Certes, le processus de la cartographie participative en trois dimensions promeut la synergie des actions de développement villageois, toutefois les acteurs préconisent la modélisation d'une zone plus vaste, à l'échelle d'une ou plusieurs Communes afin de s'assurer d'une synergie plus élargie.
Article par Andriatiana Mamy